mercredi 22 juillet 2015

Frankenstein, le démiurge des Lumières

Frankenstein, le démiurge des Lumières

Appel à contributions

Colloque international 8-9-10 décembre 2016.

5, rue de Candolle 
Genève, Confédération Suisse (1205) 

Pour le 200e anniversaire du début de la rédaction en 1816 à Cologny près de Genève par Mary Shelley de Frankenstein; or, The Modern Prometheus, ce colloque transdisciplinaire veut revenir sur ce grand mythe de la modernité littéraire avec ses figures, ses lieux, ses thématiques et ses objets spécifiques. Il sera notamment accompagné d’une rétrospective cinématographique (Activités culturelles, UNIGE) et d’une exposition sur les déclinaisons esthétiques de l’œuvre (Musée d’art et d’histoire, Genève). Dans un projet global d’histoire culturelle, le colloque veut mobiliser, croiser et déployer les disciplines et les savoirs des sciences humaines d’aujourd’hui pour penser le genre, les sources directes et indirectes, les antécédents, la genèse, l’écriture, le langage, la publication, la réception, la critique, les éditions, l’iconographie, l’intertextualité, les traductions, la postérité, les avatars culturels du roman Frankenstein : théâtre, littérature populaire, iconographie, arts plastiques, opéra, radio, cinéma, bande dessinée, produits dérivés, etc. À partir de l’œuvre insérée en son contexte socio-culturel, le colloque s’intéressera à la fabrication, à la diffusion, aux usages, à la descendance et aux détournements du paradigme prométhéen qu’universalise depuis deux siècles Frankenstein dans l’imaginaire social.

Dans l’héritage naturaliste et expérimental des Lumières, à la croisée des romans philosophique, épistolaire, gothique, noir et d’épouvante, au carrefour du romantisme littéraire et de la « fiction scientifique », on questionnera les grandes thématiques et les ambitieuses questions religieuses, philosophiques, politiques, littéraires, esthétiques, épistémologiques et éthiques sur la connaissance, la science, le savant, le corps, l’identité, le genre, l’expérimentation, la loi, la création et la transmission de la vie, la post-humanité, le mal et la mort que pose l’œuvre romanesque avec son imaginaire « gothique ». Autour du bricolage cadavérique de la créature, dont la bonté innée se brise sur le monde social qui la réprouve en sa difformité corporelle comme incarnation du mal moral, notre colloque balisera le périmètre culturel des sens, des usages et des représentations qu’induisent jusqu’à aujourd’hui les lectures critiques, les déclinaisons et les réappropriations de Frankenstein. Un volume collectif sera tiré des travaux du colloque.

Après le Golem (statue d’argile de la kabbale) que vivifie le « Grand rabbin de Prague », la figure démiurgique inspire la romancière Mary Shelley (1797-1851), fille du philosophe William Godwin et de la féministe Mary Wollstonecraft. Au terme d’un tour européen pour fuir l’Angleterre de la Regency, Mary s’installe en mai 1816 à Cologny avec sa demi-sœur Claire Clermont et son futur mari, le poète Percy B. Shelley. Les accompagnent l’écrivain Byron et le médecin William Polidori. L’été 1816 est apocalyptique. Le climat calamiteux attise les cauchemars nocturnes de Mary et la rêverie morbide de ses amis. Ils évoquent le médecin Erasmus Darwin (1731-1802) qui galvanise des cadavres pour les animer. Ils décident de rédiger un récit de fantômes dans le prisme du conte gothique. Le défi est relevé par Mary et Polidori, qui en 1819 édite sa célèbre nouvelle The Vampyre. De son côté,la romancière publie anonymement en 1818 Frankenstein; or, The Modern Prometheus (Frankenstein ou le Prométhée moderne, version française en 1821). Après l’adaptation théâtrale de Richard B. Peake (Presumption or the Fate of Frankenstein), elle le réédite sous son nom en 1823, avant l’ultime version de 1831. Suivant le rousseauisme épistolaire de La Nouvelle Héloïse, Frankenstein déplore la médecine expérimentale et la fabrication d’un nouvel « Adam ». Dans une Suisse pastorale, le récit suit le projet naturaliste de Victor Frankenstein. Ce lecteur de Newton assemble les débris cadavériques d’une créature haute de « huit pieds ». Y ayant greffé un cerveau, il l’anime puis voit l’éveil de la « matière inerte ». Le naturaliste est écrasé par son audace. Si la face de l’Homme créé par Dieu incarne sa bonté, celle suturée de la créature affolée reflète la noirceur morale du démiurge. Rayonnante d’amour pour l’humanité, apprenant à lire comme Rousseau dans les Vies des hommes illustres de Plutarque, mais « terrifiée » par son reflet aquatique, la créature est poussée au mal par la société qui l’abomine. Seul un vieillard aveugle la réconforte. Pressé par le « monstre » que sa défiguration prive d’« affection », Frankenstein veut créer une « réplique féminine », puis recule pour ne pas générer une « race » dénaturée. L’« hideux monstre » plonge alors son « maudit créateur » dans la désolation. La joute titanesque culmine au cœur des ténèbres purificatrices du Pôle Nord. Best-seller planétaire et intarissable source d’inspiration culturelle, le roman est adapté au cinéma au moins 135 fois depuis le Frankenstein matriciel de J.S. Dawley en 1910. Dans la cinquième version filmique par James Whale (Frankenstein, USA, 1931) pour Universal, Boris Karloff immortalise la face douloureuse du monstre, avant que la Hammer ne s’empare dès 1956 du Démiurge des Lumières. Rendu fou par sa recherche résurrectionniste, Frankenstein y devient le vrai monstre moral du mythe. 

Modalités pratiques d'envoi des propositions
Titre et résumé de communications (1000 signes) avant le 15 novembre 2015 :


Comité organisateur
Université de Genève (Faculté des Lettres, Département d’histoire générale, Unité d’histoire moderne)
Ambroise Barras (UNIGE, AC),
Justine Moeckli (MAH-Genève),
Michel Porret (UNIGE-ISTGE),
Olinda Testori (UNIGE-ISTGE)
Comité scientifique
Vincent Barras (UNIL)
Jan Blanc (UNIGE)
Alain Boillat (UNIL)
Frédéric Chauvaud (Uni. de Poitiers)
Valérie Cossy (UNIL)
Julia Douthwaite (University of Notre-Dame, IN)
Roland Fisher ( Mad Scientist Festival-2016)
Vincent Fontana (UNIGE)
Erzsi Kukorelly (UNIGE)
Jan Lacki (UNIGE)
Antoine Lilti (EHESS)
Patricia Lombardo (UNIGE)
Marylin Marignan (Université Lumière Lyon 2)
Benoît Melançon (Uni. de Montréal)
Jérôme Massard (Collectif KLAT)
Magali Le Mens (UNIGE)
Bernard Novet (metteur en scène et réalisateur de télévision)
Martial Poirson (Uni. de Paris VIII)
François Rosset (UNIL)
Martin Rueff (UNIGE)
Konstantin Sgouridis (Collectif KLAT)
Simon Swift (UNIGE)

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